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La démocratie a parlé, mardi 17 mars Bibi a été réélu pour un 4e mandat (dont le 3e consécutif) à la tête de l’état hébreu.

Même si tous les courants sont représentés au sein des synagogues libérales, nous accordons une importance particulière aux valeurs universelles : les droits de l’homme, la justice sociale, le respect et le vivre ensemble et la paix. Il est évident que certaines de ces valeurs sont davantage défendues  par un camp que par l’autre.

En 2015, pour la première fois dans son histoire, Israël rassemble plus de la moitié de la population juive mondiale avec 7M d’habitants. Alors que 6M environ vivent en diaspora. Autre fait historique, nous avons le choix : celui de nous installer ici ou là-bas, de continuer à répéter « l’an prochain à Jérusalem » ou de le vivre. Mais quel que soit notre choix, nous nous sentons interconnectes avec ce qui se passe la bas. L’état d’Israël est confronté à des problèmes de justice sociale de corruption au plus haut niveau  de l’état et bien sûr de guerre. Diriger ce pays n’est pas une sinécure et durant la campagne des avis divergents, voire opposés se sont fait entendre afin de proposer des remèdes. Mais parfois les mots prononces dépassent la divergence d’opinion, les attitudes dépassent la conviction dans ses idées. L’arrogance, une forme de toute puissance ne sont pas des attitudes attendues de la part du dirigeant d’un pays qui dépend encore du soutien de ses alliés. Et surtout le racisme n’est pas une simple opinion. Apres avoir attendu plusieurs millénaires pour pouvoir restaurer un état sur cette terre et l’avoir vécu comme une bénédiction, il ne faudrait pas que cela se transforme en  malédiction…ce que certains signes nous font malheureusement présager.

Les décisions qui concernent l’état d’Israël, mais aussi les mots qui sont prononcés impactent directement, en bien ou en mal, la population juive mondiale.

Tous les samedis matins, nous remercions l’Eternel pour la restauration de l’état d’Israël et prions aussi pour que nos dirigeants agissent avec sagesse. Après une campagne particulièrement clivante, Benyamin Netanyahou doit être suffisamment sage pour rassembler à nouveau non seulement à l’intérieur mais également à l’extérieur de l’état.

Selon l’agence juive 7000 juifs français ont fait le choix de traverser la Méditerranée en 2014 et probablement 2 fois plus sauteront le pas en 2015 : ils représentent le plus gros contingent de l’alya en Israël.

Pour écrire une nouvelle page de leur histoire en « terre promise », ces nouveaux arrivants ont quitté une culture, une langue, des amis, un travail.

Quels que soient les mobiles à l’origine de leur décision : choix raisonné muri de longue date, ou effectué dans l’urgence sous la contrainte, ils ont mis un immense espoir dans ce nouveau départ. Pour la plupart cet espoir est celui de trouver la sécurité, même si cette notion est très relative en Israël.

Quelques jours nous séparent de Pessah, et de la lecture de la Haggadah qui relate l’exode des hébreux. Bien sur  le départ des juifs de France a peu de choses à voir avec la sortie d’Egypte, cependant le livre de l’Exode qui relate notamment cet épisode est utile pour marquer une pause et retirer quelques enseignements.

Le verset du Shirat Hayam cantique qui célèbre la traversée miraculeuse de la Mer Rouge (ou la mer des Joncs)  m’a tout à coup frappée par sa lucidité.

« Shira hadasha shibkhou geoulim leshimkha ad sfat hayam » Au bord de la mer, de joie les délivrés chantèrent un chant nouveau, à la gloire de son Nom (de Dieu).

C’est un des rares épisodes de l’exode où le peuple hébreu exprime sa joie, la reconnaissance envers l’Eternel, et aussi un des rares moments où il ne se plaint pas !

Les hébreux – ivrim de la racine –avar– traverser, passer, mais aussi transgresser,  viennent de traverser un danger mortel, ils ont dépassé leur peur et leurs doutes et se sont retrouvés de l’autre côté. Ils quittent leur passé- avar – d’esclaves pour devenir des hommes libres et prendre en mains leur destin.

L’historicité de cet épisode est hautement controversée par les spécialistes de la Bible, mais cela importe peu ici, ce récit est comme un miroir intemporel qui nous est tendu pour étudier nos propres attitudes dans des situations similaires. Lorsque nous espérons tant échapper à un danger et que nous attendons de « passer de l’autre côté ». Mais est-ce suffisant d’arriver sain et sauf de l’autre côté? Est-ce une garantie de changements positifs ou n’est-ce pas plutôt une étape sur notre long chemin d’apprentissage de la vie.

La vie qui est remplie de « passages », d’entre deux, de sas ou nous attendons avec impatience d’être « de l’autre côté » sans vraiment savoir ce que cet autre côté nous réserve? Faire sa bar mitsva, avoir réussi ses examens, avoir trouvé un travail, de se marier, s’installer, être à la retraite, partir en vacances. En ce moment nous attendons enfin la chaleur et le renouveau qu’apporte le printemps. Alors si tout va bien nous nous réjouissons rapidement et nous engageons vers un autre objectif à atteindre ou fuyons un nouveau danger. Toutes ces transitions sont nos moments de vie ou parfois il serait bon de s’arrêter, prendre le temps de réellement la célébrer et de réfléchir. Quelle est l’étape suivante, quel véritable changement cela va m’apporter? Suis-je prêt à aborder ce changement avec un peu plus de sérénité voire de sagesse ?

Cette traversée de la Mer Rouge nous parle de notre identité. Le Peuple hébreu est un peuple du passage, de l’entre deux, en attente d’un ailleurs, d’une terre promise où il pourra enfin se reposer. C’est un peuple sous tension dont l, identité se construit entre deux rives.

André Neher dans son livre « identité juive » l’exprime avec une grande clairvoyance : « Hébreu le Juif est en exil, Israélite il est dans le Royaume. Mais Exil et Royaume ne sont-ils pas contradictoires ? Comment peut-on être à la fois en Exil et dans le Royaume, à la fois vagabond et installé ? Comme au prophète Dieu dit au Juif : « lève-toi prends quelques forces, mange bois et continue ton chemin la route est encore longue. » « Le ghetto est impossible, l’assimilation est impossible…seule reste possible la nécessaire découverte d’un judaïsme intérieur et authentique avec les hommes et en dehors de l’humanité. »

Comment trouver une certaine paix intérieure le long du chemin après chaque étape? La liberté d’être pleinement ce que nous sommes ?

Cet épisode biblique nous apprend que lorsqu’on « s’éloigne de » il est peu probable de trouver cette sérénité alors que lorsqu’on « va vers » nous-mêmes on s’en rapproche davantage.

 

Quels que soient nos choix personnels, actuels ou à venir, qu’on choisisse de vivre en Europe ou en Israël soyons les gardiens des valeurs qui nous ont été transmises en partage sans concession.

Puisse la fête de Pessah être un moment de réunion des dispersés, de célébration mais aussi de prise de conscience de notre responsabilité envers nous-mêmes et envers l’humanité ici et sur l’autre rive pour laisser, individuellement et collectivement une trace, la plus positive possible de notre passage ici-bas.

Hag Sameah!